Les fortifications Italiennes du Mont Cenis
Le plateau du Mont Cenis se situe entre la vallée de la Maurienne en France et le Val de Suse en Italie. C'est un des points de passage historiques des Alpes depuis... longtemps. En 1860, la Savoie est rattachée à la France mais le plateau reste du côté Italien. La frontière se situe alors au col dominant la vallée de la Maurienne. Ainsi, durant la seconde guerre mondiale, les troupes militaires Italiennes, puis Allemandes à la fin de la guerre, tiennent les hauteurs et dominent les Français. A la sortie de la guerre, la frontière sera décalée du côté Italien, en dessous du plateau, pour inverser cette situation. En 1968, un barrage est édifié et un lac occupe désormais le plateau.
L'histoire
On trouve sur le plateau, ses abords et ses sommets environnants, des fortifications de deux périodes :
Les forts de Variselle (1878-1883), de Ronce (1878-1883), de Pattacreuse (1886-1888), le Malamot (1890-1894), La Turra (1893-1914) et le Mont Froid (1898-1906) qui datent de la fin du 19ème siècle, sont dit du type "Séré de Rivières". Ce sont des forts en pierre, plus ou moins enterrés. Au lieu de construire une seule place forte, le système de défense "Séré de Rivières" se base sur l'implantation de plusieurs ouvrages pouvant se défendre mutuellement. Mais à la même époque, un nouvel obus beaucoup plus puissant que les précédents voit le jour. C'est la "crise de l'obus torpille". Bon nombre de forts vont alors être déjà obsolettes à leur achèvement. Toutefois, le principe de la défense mutuelle reste de mise.
Entre 1931 et 1942, l'Italie implante sur sa frontière alpine de nombreux ouvrages modernes enterrés et bétonnés (l'équivalent de la ligne Maginot française) appelés : Vallo Alpino. Ils sont composés majoritairement de galeries souterraines d'où seuls les postes de tirs sous casemate (enterrée et bétonnée) et les cloches d'observation et de tirs dépassent du sol. Leur armement est principalement composé de mitrailleuses, de canons antichars de 47mm et de pièces d'artillerie de 75mm ou plus rarement de 100mm. L'Italie entre en guerre contre la France le 10 juin 1940. Les ouvrages ne vont pas être utilisés pour la défense mais pour appuyer les attaques des troupes Italiennes. Mis à part le fort du Chaberton (dans le Briançonnais, donc en dehors de cette zone) qui connaîtra une épreuve du feu douloureuse, l'ensemble des fortifications du Mont Cenis sera relativement peu utilisé en ce début de guerre. A partir de l'automne 1944 et suite au débarquement allié en Provence, les troupes Allemandes investissent les fortifications du Mont Cenis, pour ensuite les abandonner.
Les vestiges
Aujourd'hui il est encore possible de découvrir de nombreuses installations souterraines, depuis les bords du lac jusqu'aux sommets, ainsi qu'au bord des routes.
A proximité des lignes de crêtes, les entrées se trouvent généralement à l'opposé du territoire français (de l'époque) afin de les protéger des tirs et de les dissimuler aux regards adverses. A l'intérieur, une chicane avec un créneau de tir en face de la porte protégeait l'entrée. S'ensuit souvent des couloirs le long desquels on peut distinctement observer les emplacements pour les canalisations d'air (de couleur verte) ou des lignes électriques parfois encore en place avec leurs boitiers de dérivation ou les lampes. Divers renfoncements ou pièces se trouvent le long de ces galeries. On y trouve souvent des débris de bacs en amiante-ciment qui servaient à stocker l'eau sur des socles en béton. Ils sont faciles à reconnaître car les socles sont souvent pourvus d'une ou deux arches en dessous et sont contre un mur. Si par contre, les socles sont pourvus de tiges métalliques et écartés des murs, ils servaient pour l'installation d'un groupe électrogène ou d'une machine de ventilation. Les parois des galeries et des pièces sont généralement peintes en blanc, pour palier au faible éclairage. Dans certaines installations, on trouve encore les vestiges d'un système de communication visuelle "fotofonico", qui se compose de 2 tubes métalliques sortant de l'ouvrage en direction d'un autre.
Pour en savoir davantage : https://journals.openedition.org/insitu/19903
Et des détails : http://valloalpino.altervista.org/bunker/bnk-home.htm
Visiter
Nous vous proposons 2 randonnées qui se trouvent toutes les deux à l'ouest du lac, avec le même départ. Pour les amoureux de la liberté de bivouaquer, vous pouvez poser votre van en plusieurs endroits de la piste qui contourne le lac. Sinon, de nombreux replats vestiges des anciens aménagements militaires permettent de planter aisément une tente.
Au départ du Plan de la Madeleine (indiqué sur les cartes IGN). En arrivant, vous pourrez découvrir au bord de la piste le centre 14, puis au pied de la crête rocheuse, de l'autre côté de la route, le centre 13B.
Jour 1
Sur une autre journée (sinon vous n'aurez pas le temps de tout découvrir), empruntez l'ancienne route militaire qui monte en direction du Fort de Pattacreuse. Vous pourrez ainsi découvrir (dans l'ordre), deux abris O et 1/IV, pour vous échauffer, et la batterie B1 pour une première pause. Ensuite, la route militaire fait des lacets, avec de beaux murs de soutènement en pierre, pour atteindre un plateau. Sur ce plateau, différents éléments sont à découvrir : de petits postes de tir, des refuges, l'installation d'un ancien téléphérique,...
Empruntez un sentier sur votre gauche, sans atteindre le fort, pour monter en direction de la crête au sud ouest. Vous découvrirez ainsi encore 2 ou 3 refuges, mais surtout, juste sous la crête, le centre 10. Descendre ensuite par la crête jusqu'au fort de Pattacreuse.
Prévoir un bon moment pour visiter l'ensemble des installations, sans oublier le centre 12 qui se trouve au bout de la crête dominant le fort.
Ensuite vous pouvez partir en direction de l'EST sur le plateau, pour découvrir la batterie basse et le centre 11. Enfin, rejoignez le bord du plateau pour trouver le centre 13 (accès délicat).
Vous pouvez après tout cela rejoindre encore la crête et le centre XIII. De là, il est possible de descendre directement dans les pentes pour rejoindre en contrebas l'ancienne route militaire.
Jour 2
Le lendemain, vous pouvez reprendre la même route, mais juste après les premiers refuges, au niveau du replat, prendre la sente à gauche (direction du SUD-OUEST). L'itinéraire est bien plus sauvage car peu fréquenté. En rejoignant la large croupe herbeuse, vous y découvrirez de nombreux emplacements pour canons au milieu d'un champ d'edelweiss (en fonction de la saison) (pas pour les emplacements mais pour les edelweiss évidemment, quoi que sous la neige...). Ensuite, rejoignez les bâtiments de logement de troupe de Giaset (source d'eau) puis continuer la route jusqu'au Fort Malamot. En montant ou en descendant, découvrez les centres 6 (au sommet mais peu accessible), 7, 8 et 9 (comprenant de nombreuses galeries et postes de tir, mais certaines sont bloquées par la glace).
En redescendant, après les bâtiments de Giaset, vous pouvez partir en direction d'une crête rocheuse bien marquée, en suivant la ligne à haute tension. Vous y découvrirez un refuge. Puis rejoignez la piste en passant par les Batteries de Frasere et la B2 (en vous écartant bien du sentier). Rejoignez pour finir la route du bas, puis votre point de départ (ou ailleurs, comme vous voulez).
Bonne rando et bonnes découvertes !